La
Fouine Futée
Loi 78, pis quoi encore ?!
Jusqu’à
maintenant, je ne me suis pas réellement prononcé au sujet de la grève
étudiante, mais le projet de loi 78 ne peut pas passer sous silence…
Je n’ai pas étudié
le projet de loi de long en large et je ne possède pas de bac en droit pour me
permettre de la comprendre dans les moindres détails. Cependant, je peux déjà
affirmer qu’il s’agit d’une loi brimant les droits de la société québécoise.
Ce qui va suivre
est mon interprétation personnelle d’une partie du projet de loi 78, soit la
section III, article 16. Partie du projet de loi qui semble pouvoir s’appliquer
à l’ensemble de la population, puisqu’il n’est pas spécifié que cette section s’applique
uniquement aux étudiants. Il est possible que je me trompe et je vous serais
reconnaissante de m’en faire part si tel est le cas.
Pour illustrer mon
point de vu quant à l’absurdité de ce projet de loi, je vais utiliser plein d’exemples
et une petite mise en situation.
Tout d’abord, nous
retrouvons au début d’une loi ou d’un projet de loi une section qui contient l’interprétation
du sens des termes utilisés. Dans le cas du projet de loi 78, voici cette
section :
 |
Extrait du projet de loi no 78 - 2012 |
Notez
bien que les seuls termes qu’on retrouve sont : association d’étudiants,
collège, établissement, fédération d’associations, salarié et université. Ce qui signifie que tous les autres
termes utilisés dans ce projet de loi sont libre d’être interprété selon le bon
vouloir de la personne qui les lit.
Et ensuite, voici
la section qui m’intéresse particulièrement :
 |
Extrait du projet de loi no 78 - 2012 |
(
Il est à noter qu’un amendement pourrait être apporté concernant le nombre de
personnes, le faisant passer de 10 à 25 personnes. )
Maintenant que j’ai
ces deux éléments, permettez-moi d’en ajouter quelques-uns, à commencer par la
définition de du terme « manifestation » :
Manifestation :
n.f. 1. Action de manifester un
sentiment ; témoignage, marque. Des
manifestations de tendresse. 2.
Fait de se manifester. Quelles sont les
manifestations de la maladie ? 3. Événement organisé dans un but
commercial, culturel, etc. 4.
Rassemblement collectif, défilé de personnes organisé sur la voie publique, et
destiné à exprimer publiquement une opinion politique, une revendication. Abrév. (fam) : manif. (Source : Le Petit Larousse illustré
2011)
Oh que de joie !
En un seul mot, nous voici avec la possibilité d’avoir une loi qui s’interprète
de 4 façons différentes ! Procédons par exemple.
Si on se fie à la
définition no 1 du mot «manifestation» : La loi pourrait s’appliquer lors
de partie de hockey, de soccer, un concert, etc.
Ex. : Une
partie de hockey. Supposons qu’un joueur compte un but, on peut s’attendre à ce
que la foule manifeste leur joie
ou leur découragement.
Est-ce qu’il y
aura plus de 25 personnes ? Probablement !
Est-ce dans un
lieu accessible au public ? Évidemment !
Donc
la loi sera applicable ! Les organisateurs seront dans
l’obligation d’avertir, par écrit, huit heures avant l’évènement, le corps de
police qui dessert le secteur. Les renseignements donnés : la date (ok), l’heure
(ok), la durée (avec ou sans prolongation ?), le lieu (ok), l’itinéraire (euh…
avant, après ou pendant ?), les moyens de transport utilisés (bonne chance !)
Passons à la
définition no 2 : Le fait de se manifester… un groupe peut se manifester
de multiples façons. Ex. Certaine minorité visible manifeste leur présence en
demeurant dans des quartiers d’appartenance… Les groupes religieux manifestent
leur présence en se rendant dans les l’église ou d’autres lieux de cultes représentant
leur religion… etc. Encore une fois, la loi devient applicable… et les
renseignements à donner seront tout aussi difficile qu’à la définition no 1. Le
nombre de personnes sera supérieur à 25 et les endroits où tout ceci ce déroule
sont accessibles au public.
Définition no 3 du
mot « manifestation » : vous pouvez vous reporter à la définition no 1.
Dans les exemples vous pouvez ajouter les lancements de produits, les
expositions, etc.
Et finalement, la définition
no 4 : je ne m’éterniserai pas à vous décrire comment la loi serait
applicable, mais je crois qu’il est important de savoir que dans cette
catégorie, les manifestations étudiante ne sont pas les seuls qui pourront être
sanctionnées. Tous les défilés : fierté gai, marche de la paix, défilé
de la St-Jean, etc. se retrouveront sous l’emprise de cette loi !
Pour continuer mon
interprétation de la section III de ce projet de loi, je vais m’attarder à la
notion de « lieu accessible au public »… Plusieurs endroits sont considérés
accessible publiquement. Les bibliothèques, les musées, les hôpitaux, les
établissements scolaire, les bibliothèques, les rues, les parcs, les salles de
concert, festival et j’en passe… cette loi sera donc applicable quasiment
partout et en toutes occasions, tant que les critères de lieu accessible
publiquement ainsi que le nombre de personnes présentes sont respectés.
Donc pour
terminer, je vais me faire le plaisir de vous proposer une mise en situation
ainsi que mon analyse… ça ressemblera un peu à l’exemple de la définition no 1
du mot « manifestation »
Mise en situation :
Cent vingt-cinq députés sont réunis
à l’hôtel du Parlement pour débattre
d’un projet de loi X durant une séance de l’Assemblée nationale. Les échanges
vont bon train lorsque tout à coup, le Premier Ministre Jean Charest,
accompagné de l’ensemble des députés de son parti, manifestent, haut et fort, leur mécontentement et leur colère
contre les propos que vient de tenir la chef de l’opposition officielle Pauline
Marois à leur encontre.
Oh oh oh !!! Que
de plaisirs !! Passons maintenant à l’analyse :
Le
lieu est-il accessible au public ? OUI !! L’hôtel du
Parlement est un lieu public. Il est possible d’assister aux travaux de l’Assemblée
nationale. De plus, tout est diffusé en direct sur internet.
Le
groupe qui manifeste dépasse t’il 25 ? Oh que oui !! Il s’agit
de Jean Charest et ses 62 députés.
Est-ce
une manifestation ? Une manifestation de sentiments, certes…
mais une manifestation tout de même. Puisque rien n’indique l’interprétation du
mot « manifestation » que l’on doit prendre dans le projet de loi 78, la loi deviendrait
donc applicable dans une telle situation !
La question est :
Est-ce que le ou les responsable(s) des travaux de l’Assemblée nationale ont
prévenu, par écrit, le corps policier responsable du secteur où se tient cette
manifestation au moins huit heures à l’avance ? Permettez-moi d’en douter !
Morale de l’histoire :
Heureusement pour Charest, le ridicule ne tue pas… sinon, on serait déjà en
élection !
Sur ce, bonne
réflexion à tous et toutes !